Je suis la dernière et l’aînée.
Dernière de ma mère, première de mon père.
Si je ne compte que les moitiés, j’ai 3 sœurs en entier.
Demi ou vrai, qu’importe.
Je choisis nos souvenirs.
Si je devais te les raconter, je te dirais l’oiseau que nous avons sauvé, la tête sous l’eau sans se boucher le nez, les coupes au carré, une endive en guise de goûter, les caméras cachées, le concert de MC Solaar, les cœurs dessinés sur le miroir de la salle de bains. Je te dirais aussi les jours de pluie, les histoires d’amour qui finissent mal, les torticolis, Michael Jackson sur la route de Chaponost, les massages du côlon, l’huile de foie de morue, les litres de romarin, les retours chez maman.
Il y a aussi tout ceux que je tairais.
Ceux qui n’existent pas ou ne m’appartiennent pas.
La sensation d’être étrangère dans une demi-famille.
Les Noël auxquels je n’assiste pas, les vacances organisées sans moi.
Les malaises, les crises de larmes, la jalousie.
Là-bas, je dois montrer l’exemple, et surtout restez polie.
Ma mémoire est vide de toi, toi, et toi.
J’aurais aimé raconter nos soirées McDo à regarder des Disney, nos secrets, nos fous rires, les matins où nous nous réveillons toutes dans le même lit. La complicité qu’on ne pourra pas créer.
Nous partageons le même nom de famille, et la seule image qui me vient, c’est ce voyage à Courchevel dans la baignoire de l’hôtel. Les parents sont sortis. Je rince tes cheveux au vinaigre. Tu poses ta joue sur mes genoux, je cherche les petites bêtes dans ta tête.
Tu me souris.